Hans Corell: « La commission Européenne a mal interprété mon avis »

«Je crois que l'on a mal interprété mon avis juridique au Conseil de sécurité et d'une manière très incroyable", a déclaré l'ancien conseiller juridique de l'ONU, Hans Corell, à la radio suédoise aujourd'hui. «Il est important que l'Europe n'agisse pas à entraver la voie de l'ONU pour trouver une solution au conflit", a-t-il déclaré à propos de la pêche de l'UE sur le territoire.

Publié 26 décembre 2010

Aujourd'hui, la question du Sahara Occidental est débattue au Parlement suédois. Une manifestation pour la défense des droits du peuple sahraoui s’est déroulée devant le Parlement pour protester contre les violations des droits humains marocains et le pillage de l'UE sur le territoire. « C’était un scandale que l'accord de pêche de l'UE soit signé la première fois. Maintenant, nous espérons que cet accord ne sera pas renouvelé. Nous espérons que le gouvernement suédois votera contre l'accord cette fois encore », a dit Anna Nilsson, de l'ONG suédoise Emmaüs, à propos du pillage illégal du territoire par l’UE.

Dans le même temps, ce matin,l'ancien Secrétaire Général Adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique des Nations Unies, a sévèrement critiqué la pêche de l'Union Européenne au Sahara Occidental, dans une interview à la radio nationale suédoise. Il qualifie l'interprétation par la Commission du document de l'ONU d’«incroyable».

Écoutez le programme d'aujourd'hui à la radio nationale suédoise (en suédois).

Transcription et traduction ci-dessous par Western Sahara Resource Watch

[Corell:] Le Maroc n'a pas été reconnu par l'ONU en tant que puissance administrante au Sahara Occidental, et tout argue que le Maroc occupe en réalité le Sahara Occidental. Les règles disent que, quelles que soient les bases juridiques de la présence du Maroc sur le territoire, le territoire doit être administré dans l'intérêt du peuple. Et dans ce cas, il était prévu que le peuple du Sahara Occidental prenne part à un référendum, pour décider eux-mêmes de la façon dont le territoire serait gouverné à l'avenir. [...] Cela n'a toutefois jamais été organisé. [...] 

L’objet de la manifestation [aujourd'hui à Stockholm] était la pêche au Sahara Occidental. Pourquoi y a t-il des navires de pêche européens sur le territoire?

[Corell:] Ceci est dû à un accord de pêche. Ceci constitue réellement la grande question : les ressources du territoire. Le Conseil de sécurité en 2002 m’a demandé de faire une déclaration sur des accords d'exploration pétrolière au large des côtes du Sahara Occidental. Ma conclusion était que si les entreprises de ce type agissaient sans l’autorisation préalable du peuple du Sahara Occidental, et à l’encontre de ses intérêts, une telle activité serait en violation du droit international. La même chose s'applique à l’accord de pêche: si l'accord n'est pas signé avec l’avis du peuple du Sahara Occidental, ou après une consultation avec eux, et que les avantages ne vont pas à la population du territoire, il est alors en violation du droit international. Je crains que nous soyons dans cette situation, dans ce cas présent. 

Est ce que le peuple du Sahara Occidental bénéficie de cet accord?

[Corell:] C'est la grande question. Ce que je voudrais souligner, c'est que dans cet accord, de façon très fourbe on a même évité d’évoquer qu'il y a ce problème du Sahara Occidental. Si l'on veut conclure un tel accord, il doit être très clair dans l'accord qu'une certaine partie du territoire n'est pas sous la souveraineté du Maroc, mais qu’il fait partie d'un Territoire Non Autonome. Et dans ce cas, il faut avoir de vraies règles sur la façon dont l'accord bénéficie à la population. 

Le nouvel accord comprendra de telles règles?

[Corell:] Je ne sais pas moi. Je suis allé moi-même à Bruxelles, et je me suis entretenu avec la commissaire européenne pour la pêche, Mme Damanaki de Grèce, et j’ai aussi été en contact avec le Service juridique à Bruxelles, parce que je crois que l'on a mal interprété mon avis juridique au Conseil de sécurité, et d’une façon incroyable. Je pense que mon avis est très clair : ce genre d’affaires, si elles doivent avoir lieu, doivent être en conformité avec les souhaits et les intérêts du peuple. 

Quel rôle peut jouer la Suède dans ce domaine?

[Corell:] Eh bien, la Suède a voté contre la dernière fois. Après mon avis cela était correct. Je pense qu'il est extrêmement important que l'Europe, de toutes les régions du monde, défende le droit international dans les faits. Il est important que l'Europe n'agisse pas à entraver la voie de l'ONU pour trouver une solution au conflit. [Corell:] 

Je vous remercie, M. Hans Corell, ancien conseiller juridique des Nations Unies et expert en droit international.


 

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