Le Maroc a reçu 4 millions d’€ de l'Union Européenne pour mettre un terme à l'usage nocif de filets dérivants. Les syndicats de pêcheurs traditionnels et côtiers du Maroc affirme que la totalité de la somme a été donnée à deux individus dépourvus d’un statut juridique leur permettant d’obtenir cet argent, et a mis l'affaire devant la justice.
Photo ci-dessus : un pêcheur marocain décharge des filets dérivants dans le port de Tanger, au Maroc. Photo Oceana.Les médias marocains
sont en pleine effervescence avec cette information d'un scandale financier énorme pour leur ministère de l'Agriculture et de la Pêche. Le scoop est de El Masa, un journal marocain, qui a publié vendredi 26 Juin des documents compromettants qui étayent de manière significative l'accusation du syndicat des pêcheurs.
Selon les documents de El Masa, un représentant du ministre marocain de l'Agriculture et de la Pêche appelé Zakia Driwish eu une réunion avec deux individus, KY et MS, qui ont demandé à se faire passer pour des représentants des pêcheurs afin d'être en mesure de prendre les 4 millions d’€. K.Y. en tant que secrétaire général de l'Union des pêcheurs, tandis que MS comme secrétaire local de la Fédération nationale des travailleurs de Tanger. En réalité, les deux hommes, dont les noms n’ont jusqu'à présent pas été divulgués, n’avaient rien à voir avec un quelconque syndicat.
Le vrai Secrétaire général de l'Union syndicale des pêcheurs traditionnels et côtiers, Rachid Sueli, a porté plainte pour usurpation d'identité en 2013. Cette plainte a été examinée une première fois par la Cour de Tanger la semaine dernière, le 23 Juin. Selon Sueli, les pêcheurs n’ont pas vu un centime de l'aide de l'UE. Au lieu de cela, selon lui, il y a eu un accord au Ministère pour le partage de l'argent. Cette affirmation semble maintenant être étayée par des documents vus par El Masa.
Dans le cadre du protocole précédent de l'accord de pêche UE-Maroc, qui a duré de 2007 à 2011, le Maroc a reçu une somme annuelle de 1 million € pour encourager ses pêcheurs à abandonner l'utilisation destructrice des filets dérivants. L'accord de pêche UE-Maroc est particulièrement controversé parce qu’il permet au Maroc de contrôler les zones de pêche. Par conséquent, les navires de l'UE violent le droit international par leur activité dans les eaux du Sahara Occidental qui est sous occupation militaire marocaine depuis 1975.
Une évaluation de 2011 du précédent Protocole de l’accord de pêche a prouvé que toute l'affaire était désastreuse pour les stocks de poissons, les stocks possédés par le Maroc étant épuisés et les stocks du Sahara Occidental sous forte pression. L'UE a en quelque sorte cherché à contrer les critiques sur l'environnement en soulignant qu'elle payait le Maroc pour qu’il encourage sa propre flotte à abandonner l'utilisation de filets dérivants. Mais l'examen de 2011 a révélé qu’au moins durant les trois premières années du protocole, le gouvernement marocain n’avait même pas utilisé l'argent reçu à cet effet.
En Juin 2014, l'organisation environnementale
Oceana a publié un rapport prouvant que les filets dérivants illégaux étaient encore utilisés au Maroc.
La publication aujourd'hui d'El Masa suggère la destination finale de l'argent de l'UE : une affaire frauduleuse qui a impliqué des représentants de haut rang du ministère.