Pour la énième fois, apparaît l'auto-contradiction de l'UE par rapport au Sahara Occidental.
Le mardi 24 octobre, le Parlement Européen votera sur l'accord euro-méditerranéen UE-Maroc sur les transports aériens.
Une fois de plus, il semble que la portée territoriale de l'accord inclura le territoire occupé du Sahara Occidental. L'Accord définit le territoire du Royaume du Maroc comme «les zones terrestres (continentales et insulaires), les eaux intérieures et la mer territoriale relevant de sa souveraineté ou de sa juridiction» (art.1.14). Mais selon
la législation marocaine, cela inclurait le Sahara Occidental. Les aéroports de Dakhla et El Aaiun (souvent appelés Laayoune au Maroc), deux des principales villes du Sahara Occidental, sont intégrés dans l'espace aérien national marocain et sont listés comme aéroports marocains.
Le Sahara Occidental est considéré par l'ONU comme un territoire non autonome dont le processus de décolonisation est encore à aboutir. Le Maroc a envahi le Sahara Occidental en 1975 et continue à ce jour de maintenir une présence militaire illégale dans les trois quarts du territoire.
Les accords de l'UE relatifs à l'aviation visent à développer un espace aérien européen commun plus large, afin de faciliter l'ouverture des marchés et l'alignement de la législation aéronautique, en accordant une attention particulière aux pays voisins de l'UE.
Le Royaume du Maroc a été le premier pays en dehors de l'Europe à signer l'accord aérien. L'accord sur l'aviation avec le Maroc est provisoirement en vigueur depuis décembre 2006. En février 2014, la Commission européenne a proposé une version modifiée de l'accord, tenant compte des changements au sein de l'UE (trois nouveaux États membres depuis 2006 et le traité de Lisbonne). C'est cette version modifiée qui passe maintenant par le Parlement.
La semaine dernière, la commission des transports et du tourisme du Parlement a révisé à la hâte l'accord aérien UE-Maroc, le soumettant ainsi au vote en plénière, pour approbation finale.
Lorsque le Parlement a approuvé l'accord sur l'aviation avec le Maroc en 2006, l'Union européenne n'avait pas encore clarifié sa position juridique sur la portée territoriale de l'un quelconque de ses accords avec le Maroc. Mais en décembre 2016,
la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que le Sahara Occidental était un territoire « séparé et distinct » du Maroc (article 106, C 104/16 P Polisario contre Conseil). En tant que tel, la Cour a déclaré qu'aucun accord de commerce ou d'association de l'UE avec le Maroc ne peut être appliqué au Sahara Occidental, sauf avec le consentement explicite de la population du territoire. Ce qui incite les services juridiques du Parlement à envisager l'application territoriale et la légalité de l'accord sur l'aviation qui doit être mis aux voix.
"Nous regrettons l'absence d'une majorité politique au Parlement pour soutenir la demande du groupe des Verts / EFG pour un avis juridique qui aurait permis une décision en toute connaissance de cause sur cette question juridique complexe ayant des implications géopolitiques critiques. Nous attendons toutefois avec impatience que la Commission européenne clarifie la portée territoriale de cet accord, avant le vote. Les citoyens européens ont le droit de savoir si leurs avions volent illégalement ou pas vers El Aiun / Laayoune et Dakhla", a déclaré le député européen des Verts, Florent Marcellesi.
"Il ne semble pas que le peuple sahraoui ait donné son consentement à l'exploitation de son espace aérien", explique Davide Contini de Western Sahara Resource Watch. "Si le Parlement doit approuver l'accord révisé mardi, il est probable que les entreprises européennes opérant au Sahara Occidental - pour le trafic de passagers ou de fret - restent dans l'incertitude juridique, notamment en ce qui concerne les règles européennes et internationales sur la sécurité et la sûreté aériennes Quelles règles devraient s'appliquer aux liaisons aériennes vers le Sahara Occidental, compte tenu de son statut «séparé et distinct»? En fin de compte, le renforcement des liens aériens entre l'UE et le Sahara Occidental, en facilitant le commerce des produits de ce territoire, soulève - encore une fois - la question fondamentale de la complicité de l'UE avec une occupation illégale", explique M. Contini.
WSRW a déterminé qu'il y a 11 vols internationaux par semaine au Sahara Occidental, opérés par Binter Canarias et Royal Air Maroc. Les vols relient Dakhla et El Aaiun à Gran Canaria. Une
nouvelle connexion vers la France, via Transavia, sera ouverte d'ici la fin du mois d'octobre 2017.
De l'entrée en vigueur de l'accord en 2006, jusqu'en 2016,
l'augmentation du trafic de passagers vers le Sahara Occidental est d'environ + 266%.