Le 16 juillet, au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, l'Espagne n'a pas endossé sa responsabilité sur l'exploitation des ressources naturelles du Sahara Occidental occupé. La Namibie dénonce.
Dans le cadre de la 44e session du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, l'Espagne a présenté le 16 juillet 2020, sa réponse aux recommandations reçues lors de son troisième examen périodique universel, un examen par ses pairs les autres États membres de l'ONU, de l'état du respect des droits de l'homme par le pays.
Lors de la troisième session de l'EPU en Espagne, en janvier de cette année, la Namibie et le Timor oriental avaient fait part de leur inquiétude concernant l'implication de l'Espagne dans le prélèvement des ressources naturelles du Sahara Occidental. Les deux pays ont formellement formulé quatre recommandations à l'Espagne, qui ont été notées dans le "Rapport du Groupe de travail sur l'Examen périodique universel - Espagne", un document de synthèse publié par le CDH en mars 2020.
Les recommandations faites par la Namibie et le Timor oriental à l'Espagne sur le Sahara occidental sont :
150.56 Adopter une législation nationale appropriée pour garantir que des personnes physiques et morales espagnoles ne participent pas de manière illégale à l’exploitation des ressources du Sahara occidental (Namibie) ;
150.57 S’abstenir de toute activité économique concernant le territoire du Sahara occidental avant d’avoir obtenu le consentement libre, préalable et éclairé du peuple du Sahara occidental (Namibie) ;
150.59 Assurer la pleine application des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme dans le contexte de l’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental (Timor-Leste) ;
150.60 S’abstenir de toute activité économique sur le territoire du Sahara occidental concernant ce dernier sans avoir obtenu le consentement libre, préalable et informé du peuple du Sahara occidental (Timor-Leste) ;
La Namibie et le Timor-Leste étaient eux-mêmes avant d'être devenus indépendants de leurs voisins Afrique du Sud et Indonésie, classifiés à la fois comme non autonomes et occupés, les deux mêmes statuts qui s'appliquent au Sahara Occidental aujourd'hui.
Le 16 juillet, l'Espagne a déclaré qu'elle "acceptait partiellement" les recommandations de la Namibie et du Timor Oriental. En ce qui concerne le total de 13 recommandations qui n'ont été que partiellement acceptées par son pays, l'ambassadeur d'Espagne auprès des institutions des Nations Unies basées à Genève, a déclaré ce qui suit au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies : "Nous sommes d'accord en termes généraux mais nous ne pouvons les mettre en œuvre que partiellement , que ce soit parce qu'il existe des différences dans la façon dont nous les mettons en œuvre, ou des facteurs dans notre ordre juridique, budgétaire ou constitutionnel qui entravent leur pleine mise en œuvre".
La Namibie a répondu immédiatement et n'a pas reculé. "La Namibie regrette toutefois de noter que ses recommandations sur l'exploitation des ressources du territoire non autonome du Sahara Occidental n'ont été que partiellement acceptées par l'Espagne. Il ne doit y avoir aucune excuse à participer à l'exploitation illégale des ressources du peuple du Sahara occidental. Le droit de décider des ressources se trouvant sur et dans le territoire, et la façon de les exploiter ou de les conserver, appartient exclusivement au peuple du Sahara Occidental. Ce droit est défini dans l'article 1 commun aux PIDCP et PIDESC doit être respectée par la puissance occupante et par tout tiers tel que l'Espagne. Nous exhortons donc l'Espagne à faire ce qui est juste et à garantir la pleine mise en œuvre de ces recommandations. Ce devoir est dû au peuple du Sahara Occidental, qui continue de vivre dans la pauvreté, alors que ses ressources sont pillées par la puissance occupante et des entreprises de pays tiers", a déclaré le pays devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies. (Traduction Wsrw)
Western Sahara Resource Watch (WSRW) comprend que l'ONU ne reconnaît pas officiellement "l'acceptation partielle" des recommandations. Selon les directives de l’EPU des Nations Unies, les recommandations partiellement acceptées et rejetées sont catégorisées de manière identique comme "vues" - soit un rejet de facto.
"Nous considérons cela comme une dérobade", déclare Sara Eyckmans de Western Sahara Resource Watch. "En n'acceptant que "partiellement" ces recommandations pertinentes formulées par le Timor oriental et la Namibie, sans expliquer clairement à quelle partie des recommandations elle est disposée à s'engager, l'Espagne empêche la communauté internationale d'évaluer si elle prend des quelconques mesures pour leurs mises en oeuvre. De cette manière, l'Espagne cherche à éviter à rendre des comptes au niveau international et sa responsabilité spécifique vis-à-vis du peuple du Sahara Occidental."
En collaboration avec l'ONG espagnole Novact, WSRW avait soumis un rapport de partie prenante pour ce cycle particulier d'EPU, soulignant que l'Espagne devrait être tenue responsable de ses antécédents en matière de droits de l'homme à l'intérieur du territoire qu'elle n'a jamais décolonisé légalement et de manière responsable : le Sahara Occidental. Le rapport recommandait à l'Espagne de respecter, protéger et honorer ses obligations en matière de droits de l'homme vis-à-vis du peuple du Sahara Occidental, en particulier de ne pas porter atteinte au droit à son autodétermination et au droit à ses ressources naturelles.
L'Espagne a l'obligation légale de décoloniser le territoire du Sahara Occidental et continue de avoir des responsabilités à l'égard du peuple sahraoui originel. Cela a été confirmé dans deux décisions rendues par le tribunal national espagnol en 2014 et 2015, qui déclarent que l'Espagne reste la puissance administrante du Sahara Occidental, faisant écho à la Charte des Nations Unies et à l'avis juridique des Nations Unies de 2002 sur les ressources minérales du Sahara Occidental.
Pourtant, lors des premier et deuxième examens de l'EPU de l'Espagne de 2010 et 2015, aucun progrès n'a été réalisé pour faire avancer le droit à l'autodétermination au Sahara Occidental, et l'Espagne n'a pas non plus fait état de ses obligations de décoloniser et d'assurer le bien-être du peuple du territoire. En outre, aucun État n'avait traité de la responsabilité en vigueur de l'Espagne vis-à-vis du Sahara Occidental.
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