Pour quelques jours encore vous pourrez trouver des tomates en provenance du Sahara Occidental occupé sur les comptoirs de légumes de l’épicerie norvégienne Coop. Mercredi, ils ont arrêté l'importation controversée. Norwatch 11 Mars 2009.
Par Erik Hagen
Lire l’article dans Norwatch (en norégien).
Traduit par Western Sahara Resource Watch
11 Mars 2009
Lorsque vous allez au rayon légume des supermarchés Coop, vous trouvez de fraîches et tentantes tomates sous plastique. Les tomates sont étiquetées "Azura", et l’emballage mentionne comme pays d'origine "le Maroc". Mais l'étiquette est mensongère.
Certaines des tomates que Coop a commercialisées et vendues depuis des mois en Norvège ont en fait été cultivées au Sahara Occidental occupé – par des colons marocains. Le Ministère Norvégien des Affaires Étrangères met en garde contre de tels commerces avec les intérêts marocains au Sahara Occidental.
Tout l'automne et l'hiver dernier Norwatch a fouillé dans l'importation norvégienne de légumes provenant du Sahara Occidental occupé. Coop a d'abord confirmé ses importations en provenance de la région, et le commerce a eu lieu secrètement tout l'hiver.
"Aujourd'hui, nous avons informé notre fournisseur que dans l'avenir, nous voulons seulement des produits dont ils peuvent garantir qu’elles ont été produites dans la ville d'Agadir», a écrit Bjørn Kløvstad, directeur de la communication à la Coop, dans un e-mail à Norwatch, le Mercredi 11 Mars 2009.
Emploi de colons
Le secteur où les plantations de tomates sont situées, à proximité de la ville côtière de Dakhla, couvre une superficie de plusieurs kilomètres carrés.
Selon le journal marocain « Le Matin », la nouvelle production agricole emploie 6000 personnes. Le nombre de salariés devrait tripler d'ici 2020.
Selon les informations de Norwatch, presque tous les employés sont les colons qui se sont installés au Sahara Occidental après l'occupation. Le nouvel engagement dans l'agriculture est une partie de la stratégie du Maroc pour s’installer dans le sud du Sahara Occidental. Le roi du Maroc est également censé avoir un intérêt propre dans l’industrie de la tomate dans les zones occupées, selon le journal « Le Matin ».
Le fournisseur de tomates de Coop, la société française Azura, est détenue par une famille franco-marocaine. La société a 36 serres dans les plantations d'Agadir au Maroc et 2 à Dakhla dans le Sahara Occidental occupé. Les plantations de l'entreprise à Dakhla ont commencé en 2006 et couvrent aujourd'hui une superficie de 76 hectares. Selon les pages web d’Azura, la ville de Dakhla est située dans « le Sud du Maroc».
La photo à droite est tirée d'un site Web du gouvernement marocain et montre les plantations de tomates de Dakhla.
Le siège français d’Azura a d'abord confirmé à Norwatch qu'ils exportaient des tomates en Norvège, Suède, Finlande et au Danemark, mais il est devenu silencieux quand nous avons envoyé des requêtes sur leurs provenances exactes, l’étiquetage des tomates et leurs clients en Norvège. Norwatch a adressé quatre demandes au responsable des relations publiques d’Azura au cours des 4 derniers mois, jusqu'ici, aucun d'eux n'a reçu de réponse. Norwatch donc a pris contact avec trois des plus grands importateurs de fruits et de légumes en Norvège : ICA, Bama et Coop. Seul Coop a confirmé acheter des légumes des plantations d'Azura - y compris au Sahara Occidental. ICA et Bama n'importent pas de tomates du Maroc.
"Nous avons, à la lumière de vos questions, vérifié la "composition" des produits que nous avons reçus de ce fournisseur. Il s'avère qu'ils ont également produit à petite échelle à Dakhla, importé cela à Agadir- pour nous les vendre», a confirmé Kløvstad à Norwatch mercredi.
Il estime que l'attention portée à la question du Sahara Occidental en Norvège, rend peu probable la poursuite de ces importations à l'avenir.
L’article continu sous le photo.
La satisfaction de la gagnante du prix de la paix
La vainqueur sahraouie du prix étudiants de la paix pour 2009, Rabab Amidane (à droite), est heureuse d’apprendre l’arrêt des importations de Coop.
"C'est une bonne nouvelle! Seul le Maroc profite de cette industrie », a dit Mlle Amidane à Norwatch.
Après avoir reçu le prix de la Paix à Trondheim en février pour son travail sur les droits de l'homme, elle a voyagé en Norvège pour une série de conférences et discussions, au sujet, notamment, de toutes les entreprises norvégiennes qui participent au pillage des ressources naturelles du Sahara Occidental.
Mercredi, Amidane a pris part à une manifestation sur le Sahara Occidental devant le Parlement à Oslo, organisée, entre autres, par tous les partis politiques de jeunesse.
Ouverture aux tricheries douanières
Norwatch a précédemment signalé que la Norvège, par sa collaboration à l’AELE (Association Européenne de Libre-Échange), est entrée dans des accords de libre-échange avec les puissances d'occupation Maroc et Israël. Les accords s'appliquent à des marchandises produites à l’intérieur des frontières internationalement reconnues des deux pays.
Mais cela, toutefois, n'empêche pas les producteurs israéliens et marocains d’envoyer vers les marchés européens des produits des territoires occupés. L'UE a surtout sévi sur la pratique de l'importation en provenance des zones occupées par Israël. Une série d'importateurs européens ont été pris en flagrant délit de tricherie à l'égard du pays d'origine. Dans la période du 1er février au 30 juin 2008 les autorités douanières britanniques ont refusé d'accepter 529 certificats d'origine israéliens.
L’acoord de la Norvège avec le Maroc par l’AELE peut entraîner que des importateurs norvégiens trichent avec les droits de douane de la trésorerie nationale norvégienne. Norwatch a déjà écrit qu'il est impossible de savoir dans quelle mesure les autorités douanières vérifient les certificats d'origine du Maroc / Sahara Occidental.
La Norvège importe près d’une tonne de tomates en provenance du Maroc chaque année. Les droits de douane pour les tomates en Norvège varient tout au long de l'année et sont particulièrement élevés au cours de l'été, la moitié de l'année, lorsque les agriculteurs norvégiens produisent eux-mêmes des tomates. Au cours de cette période, la Norvège n’importe normalement pas de tomates du Maroc. Dans l'hiver, cependant, le droit de douane est nul, peu importe de quel pays provient l’importation.
Pendant la période intermédiaire d’octobre, le droit de douane est relativement bas. Au cours des 2 dernières semaines d'octobre il n'y a pas de douane à l'importation de tomates marocaines, alors que la taxe pour tous les autres pays est de 0,2 d'euros pour 1 kg. La différence rend possible que les entreprises qui importent des tomates du Sahara Occidental – et falsifient le label comme marocain – s’en sortent avec un tarif moins cher.
On ne sait pas si les importateurs norvégiens ont utilisé de telles lacunes en falsifiant les étiquettes des produits du Sahara Occidental comme venant du Maroc.
Norwatch a indiqué auparavant qu'il est impossible de déterminer si les douanes norvégiennes contrôlent si les produits israéliens et les marocains proviennent de l’endroit indiqué ou s’ils proviennent de territoires occupés.
Occupé
En 1975, le Maroc et la Mauritanie ont conclu un accord secret avec l'ancien colonisateur Espagnol, divisant le Sahara Occidental en deux. La partie nord devait devenir la propriété du Maroc, et la partie sud celle de la Mauritanie. L'accord était en opposition avec une série de résolutions de l'ONU qui exigeait que le territoire soit décolonisé. La Cour Internationale de Justice de La Haye a également conclu que la zone appartenait à la population locale et non pas l'un des pays voisins.
La zone d’où Coop a importé les tomates a d’abord été occupée par la Mauritanie en 1975. La majorité des habitants ont alors fui la région. Lorsqu’en 1979 les Sahraouis ont conclu un accord de paix avec Mauritanie qui s’est retirée, le Maroc a rapidement envahi la zone.
"L'Assemblée Générale déplore vivement l’aggravation de la situation découlant de la persistance de l’occupation du Sahara Occidental par le Maroc et de l’extension de cette occupation au territoire récemment évacué par la Mauritanie", selon la résolution de l'Assemblée générale 34/37 et concernant la zone où les plantations de tomate sont situées.
Mais la pression internationale ne va jamais beaucoup plus loin que cela. La France en particulier a soutenu l'occupation marocaine à la fois politiquement et militairement. Et au cours des dernières années, l’entreprise de tomates franco-marocaine Azura a vu les possibilités dans le pays occupé.
Des organismes juridiques allemand et irlandais demandent à l'organisateur Messe Berlin de refuser Azura, le très controversé producteur français de tomates.
Sur la base d évaluations d’images satellites, WSRW a calculé le développement des plantations au Sahara Occidental occupé de 2003 jusqu'à aujourd'hui.
La saison d'exportation de tomates du Maroc commence aujourd'hui. Mais certaines des tomates « marocaines » que vous trouverez bientôt sur les étals ont été cultivées illégalement dans un territoire sous occupation militaire. Vous avez repéré des tomates suspectes ? Aidez-nous à les identifier dans votre magasin !
Qui profite de l'agro-industrie en plein essor dans les territoires occupés du Sahara Occidental ? Sûrement pas les Sahraouis.